- Empereur, mais que t'est-il arrivé ? Tu es blessé ! s'exclama la vieille chatte.
- Ce n'est rien, maman. Je me suis battu avec un chat qui avait pénétré mon territoire.
- Vous avez une manie complétement stupide de vous battre pour un bout d'herbe, vous les solitaires, marmonna Agathe en commençant à passer un coup de langue sur les blessures de son fils.
Empereur se mit à ronronner; il se souvint des longues journées hivernales passées contre le ventre de sa mère et blottis contre ses frères, et qu'elle les couvrait de tendes léchouilles pour les réchauffer. Mais un jour, les bipèdes décidèrent de vendre les chatons, seulement, Empereur avait refusé de se soumettre à cela, d'être séparé à tout jamais de sa mère, et avait donc réussi à s'enfuir à temps. Désormais, il était devenu un solitaire -ce qui lui plaisait bien- mais il était libre et voyait sa mère quand il le désirait. Il détestait ces satanés bipèdes ! Pour bien le leur faire comprendre, il venait s'asseoir au fond du jardin, miaulant suffisamment fort pour les faire sortir de chez eux. Quand ils étaient sur le point de l'attraper, il sautait par-dessus le mur et s’enfuyait. Le solitaire avoua qu'ils traitaient bien sa mère, ils la nourrissaient bien, la câlinaient, la bichonnaient, mais ils l'avaient séparé de ses petits. Et pourtant, elle ne leur en voulait pas. Elle lui expliquait que beaucoup de bipèdes faisaient cela et que c'était normal, ce qu'il avait du mal à accepter.